Presence

Presence

Presence de Steven Soderbergh avec Lucy Liu, Chris Sullivan, Callina Lang, Eddy Mada.

Durée : 1 h 35 min. Date de sortie : 2024.

Note : ★★★★☆ (4/5)
Résumé

Rebecca, son époux Chris et leurs deux enfants, Tyler et Chloé, ne peuvent cacher leur joie alors qu'ils emménagent dans une nouvelle maison. Après de nombreuses turbulences, les membres de cette famille qui semble tout avoir pour être heureuse, espèrent ainsi prendre un nouveau départ. Mais le répit se révèle de bien courte durée. Des incidents aussi mystérieux qu'inquiétants se produisent soudain dans la demeure. Chloé voit notamment des étagères trembler ou des verres se renverser. Elle se convainc rapidement que cette étrange "présence" pourrait être l'esprit de Nadia, sa meilleure amie récemment décédée...

Critique

Presence de Steven Soderbergh est une histoire de fantôme… mais pas tout à fait comme les autres. Ici, l’esprit — peut-être celui de Nadia, la meilleure amie de Chloé — erre de pièce en pièce, et c’est la caméra elle-même qui l’incarne. Pendant toute la durée du film, le spectateur adopte donc un point de vue subjectif unique, celui d’une présence invisible qui observe une famille s’installer dans sa nouvelle maison. Soderbergh transforme ainsi le public en voyeur malgré lui, glissant silencieusement dans les couloirs, témoin des tensions et des zones d’ombre du foyer.

Le film se déploie entièrement en huis clos, et repose sur une mise en scène très maîtrisée : longs plans-séquences, stabilisateur pour donner au fantôme une trajectoire fluide, quasi absence de coupes, et un tournage avec une petite caméra mirrorless. Légère, maniable, discrète, elle permet d’épouser le comportement “flottant” de l’entité. Soderbergh, équipé de chaussons silencieux, veille à ce qu’aucun bruit parasite ne trahisse les déplacements du spectre. La lumière, souvent naturelle ou issue du décor, contribue à une atmosphère réaliste, presque domestique — le but n’est pas d’impressionner, mais de faire croire à une présence réelle dans un espace réel.

Si le fantôme observe les habitants, très peu d’entre eux semblent réellement percevoir cette force invisible. Une scène se distingue : un personnage fixe directement l’objectif, brisant un quatrième mur implicite et créant un véritable frisson. Mais il faut aussi reconnaître que ces choix techniques peuvent dérouter. Ils donnent au film une tonalité hypnotique… ou trop lente, selon la sensibilité du spectateur.

Conclusion

Avec Presence, Soderbergh propose une approche radicalement originale du film de fantôme. Le spectateur ne “voit” pas l’esprit : il devient l’esprit. On se retrouve au plus près des personnages, à découvrir leurs fragilités, leurs tensions et leurs petits secrets. Ce dispositif va toutefois à rebours des codes du cinéma d’horreur : ici, pas de jumpscares, pas de surenchère spectaculaire. L’effroi vient du regard, pas du choc. Le film ne révolutionne peut-être pas le genre, mais il impose une démarche singulière, presque expérimentale, et rappelle que Soderbergh aime avant tout explorer des terrains où d’autres ne vont pas.

Terrage Frédéric
🎞️ Bande-annonce du film